Impôts locaux : les explications embrouillées de Collomb

Impôts locaux : les explications embrouillées de Collomb

Les incertitudes autour du projet d'Emmanuel Macron de supprimer la taxe d’habitation.

Faire contre mauvaise fortune bon coeur. En bon soldat du macronisme en marche, Gérard Collomb s’est sacrifié sur l’autel des impôts locaux. Il y a deux semaines, il a accompagné Emmanuel Macron devant l’Association des maires de France. Ces derniers n’y sont pas allés par quatre chemins pour faire comprendre qu’ils sont vent debout contre son projet d’exonérer 80 % des ménages de la taxe d’habitation. Pour le candidat d’En marche !, "c’est un impôt qui est injuste socialement, qui pèse le plus en relatif sur les classes moyennes. C’est un impôt qui est injuste sur le plan territorial, il pèse plus sur les villes moyennes, les villes centres, les ruralités".

Il en aurait fallu plus pour convaincre les maires qui ne sont guère plus rassurés quand Macron leur promet que "l’État remboursera à l’euro près aux collectivités sur la base des taux actuels" le manque à gagner. Pour la première année, il n’y aura effectivement pas de problème. Les collectivités percevront exactement la somme qu’elles auraient touchée avec l’ancien système.

 

Là où ça se complique nettement, c’est pour les années suivantes. "C’est vasouillard", reconnaît un spécialiste des finances publiques. On sait ce que valent les promesses de l’État quand il s’engage à compenser à l’euro près une charge transférée aux collectivités locales. Il suffit de demander aux Conseils départementaux ou régionaux à qui les divers gouvernements de droite et de gauche avaient promis la lune. Quelques années plus tard, ils n’ont plus que leurs yeux pour pleurer.

Et c’est à chaque fois naturellement le contribuable qui est mis à contribution pour compenser le manque à gagner. Pour en revenir au projet de Macron, on peut imaginer que les gouvernements successifs auront tendance à revaloriser le moins possible les bases, histoire de ne pas alourdir la note à la charge de l’État.

 

Bref, on comprend que les maires s’inquiètent. D’autant qu’on a beau leur dire qu’ils pourront continuer à maîtriser leurs taux locaux de taxes d’habitation, personne n’a encore vraiment compris quel en sera le mécanisme.

 


Jeudi dernier, lors de la réunion organisée à Villeurbanne et à laquelle assistaient plusieurs maires de la Métropole, Gérard Collomb a ramé pour tenter de défendre la mesure.

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les explications étaient alambiquées. Même avec une note sur le sujet transmise par le cabinet du sénateur-maire, il faut s’accrocher : "S’agissant de la taxe d’habitation, la proposition qui est faite correspond à une baisse qui corrige une injustice à laquelle nous, élus, ne pouvons être insensibles. Nous savons en effet que la taxe d’habitation varie fortement pour les ménages selon leur commune d’habitation. Le mécanisme de dégrèvement/plafonnement, que reprend Emmanuel Macron, existe déjà (au niveau de 5,3 milliards sans mise en cause du pouvoir de taux). Sa proposition consiste à étendre ce mécanisme à 80 % des ménages. La taxe d’habitation continuera donc à être calculée et l’État sera amené, comme actuellement, à verser directement la partie dégrevée. Le pouvoir de taux continuera à jouer, y compris sur cette partie. La mise en place progressive permettra aux collectivités de vérifier le respect par l’État de ses engagements. Dans un tel scénario, les collectivités locales conserveront donc leur pouvoir de taux. Leur autonomie fiscale ne sera en aucune façon altérée. Plus globalement, nous voulons souligner que, loin d’amoindrir les capacités d’action des collectivités locales, le projet d’Emmanuel Macron est le seul à les renforcer significativement. Outre la fin de la baisse des dotations, il prévoit en effet de consacrer une part significative du plan d’investissement (10 milliards d’euros) aux collectivités locales. Surtout, le plan de transformation du candidat d’En Marche ! entend donner davantage de souplesse de gestion aux collectivités locales, en s’attaquant enfin à la suppression de certaines normes, en les déliant de l’obligation de suivre l’évolution du point d’indice de la fonction publique, en leur donnant la liberté de poursuivre ou non la mise en place de la réforme des rythmes scolaires. En définitive, c’est donc un vrai pacte girondin que propose aujourd’hui Emmanuel Macron aux Maires. Contrairement à d’autres candidats qui semblent faire du bloc local une variable d’ajustement, Emmanuel Macron entend être demain le Président qui fera appel à l’intelligence des territoires".

 

En attendant l’intelligence des territoires, on aimerait avoir un peu plus d’intelligence tout court pour comprendre ce qui se cache derrière cette logorrhée verbale.