Lyon : l’assassin des Pentes de la Croix-Rousse court toujours

Lyon : l’assassin des Pentes de la Croix-Rousse court toujours

Le procès du règlement de comptes de la Place Colbert s'est ouvert ce lundi devant la cour d'assises, en l'absence du principal accusé toujours en cavale quatre ans après les faits.

Le 11 mai 2012, au beau milieu de l’après-midi, Smaël Mazgar, était froidement exécuté devant de nombreux témoins, place Colbert (Lyon 1er). Plusieurs coups de feu dans les jambes, puis dans le dos alors qu’il prenait la fuite avant de s’écrouler. L’auteur des coups de feu mortel, Sid Hamed Belhadj (30 ans), lui a asséné plusieurs coups de crosse au visage avant d’aller chercher une autre arme dans une voiture pour l’achever.

 

Coup de folie

Depuis, Belhadj est en cavale. Probablement en Espagne depuis quatre ans, indice d’une certaine surface financière mais aussi de solides appuis dans le milieu pour échapper depuis si longtemps au mandat d’arrêt. Le procès se fera sans lui. En dépit de cette absence, trois hommes sont dans le box

 

Deux comparaissent pour complicité de meurtre, dont le frère de l’assassin présumé, Hamidou Belhadj (29 ans) qui conduisait le véhicule ce jour-là. Il affirme qu’il ne se doutait pas de l’enchaînement dramatique des évènements, ni de l’intention criminelle de son frère qui a été pris d’un "coup de folie" a-t-il avoué aux enquêteurs en se rendant lui-même à la police après dix jours passés dans une planque.

 

 Sabri Majri (54 ans) est accusé d’avoir fourni l’arme du crime et de l’avoir fait disparaître après avoir été imprudent dans une écoute téléphonique avec le frère de l’assassin. « Il y a quinze jours, y a ton ton franjo il m’a envoyé un mec […] bon, le machin j’ai viré le canon. [...] Tu sais que je me suis mordu les doigts quand j’ai vu ce qui s’était passé ».

 

Le troisième homme, Foued Tabi (40 ans), comparaît pour n’avoir pas empêché le crime, délit connexe à la complicité de meurtre. Il était à l’arrière du véhicule et  s’est caché sous une veste. C’est ce qu’on lui reproche aujourd’hui.

 

"Je ne sais pas"

Mais, le directeur d’enquête de la PJ a comme dilué la responsabilité des deux hommes qui accompagnaient l’assassin ce 11 mai 2012. « J’ai l’impression que ce que dit Hamidou Belhadj n’est pas faux. Il a été pris de court. Il a eu tendance à retenir son frère. J’ai l’impression que c’est un coup de tête. Quant à Foued Tabi, c’est un peu la même chose ».

 

La déposition a eu le don de faire exulter Me Alain Jakubowicz, avocat des parties civiles qui va sermonner le directeur d’enquête, façon maître d’école, en lui faisant réviser dans le détail toute la scène de crime. Le problème, c’est que le directeur d’enquête n’avait pas révisé et de nombreux éléments lui échappent et qu’il répond souvent par « je ne sais pas, je ne me souviens pas de tout ».

 

Me David Metaxas, l’avocat de Hamdiou Belhadj, est venu à la rescousse du pauvre directeur d’enquête en lui faisant rappeler ses états de service. S'il relativise la responsabilité des participants, c'est son expérience du banditisme qui parle: "L’agresseur n’était pas cagoulé, la voiture n’avait pas été maquillée et les plaques n’ont pas été changée". Des arguments en faveur du "coup de folie".

 

Contrôle de territoire sur fond de stups

Quatre ans après les faits, on ne sait pas bien pourquoi Smaïn Mazgar a été exécuté. La veille, l’homme avait déjà échappé à un guet-apens. Les frères Belhadj ont de leur côté été victime d’une tentative d’effraction, mis sur le compte de Mazgar parce qu’un « petit » du quartier l’avait rapporté. Dans les mois qui ont suivi, Mazgar aurait menacé Belhadj avec une arme sur les pentes de la Croix-Rousse. Lequel a répliqué en tirant avec un fusil mitrailleur en l’air.

 

Plusieurs témoins s’accordent pour dire qu’une rivalité existait entre les clans Mazgar et Belhadj alors même qu’ils avaient grandi ensemble dans le quartier populaire des Pentes de la Croix-Rousse. L’arrière-plan d’une guerre de territoire pour le contrôle du trafic de stupéfiants sur les Pentes est avancé par plusieurs témoignages. Verdict, vendredi.

 

Slim Mazni