Censé écouter les directives de l’archevêque et les nouvelles mesures du diocèse pour prévenir tout nouveau scandale de pédophilie en son sein, un prêtre s’est levé dans l’assistance. Et a choisi de raconter son histoire, celle d’un jeune homme agressé sexuellement il y a une quarantaine d’années par un homme d’Eglise et un ancien séminariste.
"Lorsque j’ai pris conscience du mal, comment cela m’avait pourri la vie notamment dans la relation avec les autres, il était trop tard pour porter plainte, pas assez pour penser au suicide. J’ai prévenu l’évêque du prêtre en question qui a été convoqué et a reconnu les faits. J’ai aussi contacté les deux agresseurs qui ont fait un chèque. Cela valait reconnaissance du dommage et m’a aidé à payer la psychanalyse. Le Cardinal Billé (archevêque de Lyon de 1998 à 2002 ndlr) m’avait reçu et écouté", a raconté la victime devenue prêtre. Avant de s’attaquer frontalement à Mgr Barbarin.
"La demande de pardon de l’évêque lors de la messe chrismale emprunte les mots de François. Mais elle se termine par un ajout qui le disculpe au moment même où il demande pardon : "quand bien même je n’étais pas évêque au moment de ces faits abominables". Le Pape n’avait pas eu besoin de minorer sa responsabilité. On ne plaide pas les circonstances atténuantes au moment même où l’on demande pardon.
Même reçu comme parole malheureuse, le fameux "la majorité des faits, grâce à Dieu, sont prescrits", révèle, malgré toutes les dénégations, que notre évêque ne pense pas avec les victimes. Seul l’agresseur se réjouit de la prescription", a pourfendu le prêtre qui a préféré garder l’anonymat auprès de nos confrères.
"Digne du pervers lui-même ou d'une secte"
On imagine l’ambiance au centre Valpré. D’autant que le ton du texte va crescendo dans les reproches faits au diocèse tout entier. Les pratiques d’un autre temps de Régine Maire, qui avait reçu plusieurs victimes du père Preynat ? "Nous atteignons un sommet dans la violence et la manipulation, digne du pervers lui-même ou d’une secte : obliger la victime à tenir la main de son agresseur et à pardonner (comme nous pardonnons aussi), tout cela sacralisé par des prières. C’est un second viol qui dénonce soit le cynisme de ceux qui ont pensé le dispositif soit leur incompétence criminelle. L’évêque pouvait-il l’ignorer ? Espérait-il qu’ensuite les victimes, guéries, se tairaient ?".
Le prêtre a enfin conclu en appelant Philippe Barbarin à sortir de son silence et à publiquement s’afficher aux côtés des victimes de pédophilie. "Le travail de la justice sera long, surtout s’il y a appel, peut-être plusieurs années. Les victimes ne peuvent attendre l’issue de la procédure pour que nous prenions position".