Cent jours au pouvoir : l’opposition s’inquiète de "l’incompétence" de Laurent Wauquiez

Cent jours au pouvoir : l’opposition s’inquiète de "l’incompétence" de Laurent Wauquiez

Le vote du premier budget de Laurent Wauquiez à la tête de la grande région coïncide avec ses cent premiers jours d’exercice du pouvoir. Cent jours dont il a lui-même affirmé qu’ils serviraient à « voir la différence ».

Comme Laurent Wauquiez parle beaucoup, il est facile de le prendre au mot, à défaut de le croire sur parole. Pendant la campagne des régionales, il a beaucoup promis. Le vote du budget ce jeudi permet donc de constater la concrétisation des promesses électorales.

 

Ce dont plus personne ne souvient

Il y a les choses dont personne ne souvient. Ainsi, avec le volontarisme qui le caractérise, Laurent Wauquiez avait promis aux chefs d’entreprises un dispositif régional de réduction de charges dans le cadre de nouvelles embauches. 

 

"Il sera opérationnel dans les trois mois […] Notre priorité est d’encourager ceux qui recrutent. Nous voulons aider les entreprises qui se créent ou qui se développent pendant leur phase de croissance. Pour y arriver, nous voulons mettre en place un programme d’accompagnement pour qu’il n’y ait pas de charge sur la première année pendant que l’entreprise construit son carnet de commandes et son chiffre d’affaires." a-t-il déclaré dans les colonnes du Progrès après son élection à la tête du conseil régional.

 

Trois mois après, rien. "Parce que le gouvernement l’a mis en place" justifie Laurent Wauquiez oubliant au passage que le gouvernement l’a en effet instauré en… 2014 par l’adoption du Pacte de Responsabilité et Solidarité. Et il oublie également que c’est un dispositif qu’il avait lui-même instauré alors qu’il était Secrétaire d’Etat du gouvernement Fillon en 2009. Le comble pour quelqu’un qui souhaite incarner le renouveau et la rupture, c’est de le faire avec de vieilles recettes.

 

En bref, cette promesse illustre à merveille le vieil adage politicien selon quoi "les promesses n’engagent que ceux qui y croient…". Du coup, Wauquiez promet de réfléchir à un fonds à destination des artisans et des commerçants.

 

Et puis il y a les mesures phares de son programme

Les portiques dans les lycées, dans un contexte de menace terroriste permanente, figure au premier rang des priorités du président du conseil régional. Mais devant les difficultés de mise en place du dispositif, les portiques se transforment peu à peu en tourniquets. Mais là encore, Laurent Wauquiez recule. "Il faut voir les besoins aux cas par cas, en fonction des situations sur le terrain. Il y a des lycées qui ont simplement besoin d’être sécurisé en construisant une clôture autour de l’établissement" a avancé M. Wauquiez lors de sa conférence de presse de présentation du budget.

 

10 millions d’euros sont prévus dès cette année pour la sécurisation des lycées. "Cette somme sera allouée aux travaux permettant une meilleure sécurisation des sites en fonction des besoins repérés sur le terrain" argument le dossier de présentation du budget présenté à la presse. Exit donc les portiques…

 

Toujours dans les colonnes du Progrès, Laurent Wauquiez promettait "100 millions d’euros de plus" pour la formation professionnelle. Or, aucune somme n’a été inscrite en plus dans le budget primitif qui sera présenté ce jeudi à l’assemblée régionale.

 

Les sommes inscrites au budget primitif au titre de la formation et de l’apprentissage sont en effet les mêmes que le dernier budget présenté par Jean-Jack Queyranne alors président de la seule région Rhône-Alpes. "La renégociation des marchés de formation professionnelle est en cours afin de réorienter les formations financés par la Région vers les besoins réels des entreprises" écrit Laurent Wauquiez. Rien de précis donc alors même que le président de la région refuse de participer au plan proposé par François Hollande de financer 500 000 formations pour les chômeurs.

 

« Le coup de comm’ permanent »

Jean-François Debat, patron de l’opposition socialiste, démocrates, écologistes et apparentés, fustige "l’hypermédiatisation de Laurent Wauquiez. C’est le coup de comm’ permanent. L’important à ses yeux, c’est que la presse relaye sans pouvoir vérifier ce qu’il annonce".

 

Ainsi, Laurent Wauquiez a promis de faire 300 millions d’euros d’économies sur l’ensemble du mandat dont 75 millions dès cette année. "Non, Laurent Wauquiez ne fait 75 millions d’euros d’économies. Car 15 millions proviennent de décisions prises avant lui sur des frais financiers comme des remboursements anticipés d’emprunts et des taux d’intérêts favorables. Et 7 autres millions proviennent de la baisse de la péréquation du fait de la fusion des deux régions. Donc, non il ne fait pas 75 millions d’économies" critique M. Debat.


Clientélisme

Jean-François Debat souligne également le "clientélisme" de Laurent Wauquiez qui finance la mise en lumère du Puy-en-Velay, son fief, pour 300 000 euros, une subvention de 70 000 euros pour le clocher de Saint-Laurent-du-Puy-en-Velay. Est également pointé du doigt une subvention de 50 000 euros à l’UNI sans délibération du conseil régional et un doublement du financement du festival Jazz à Vienne dans un contexte de baisse des dotations culturelles "par simple amitié pour le maire LR de cette ville" d’après le groupe socialiste.

 

Le Cantal en Auvergne bénéficiera par ailleurs d’un pacte de 125 millions d’euros. "Depuis Pompidou, c'est le plus important plan de relance consacré au Cantal" a fait remarquer le président dans les colonnes de La Montagne. "Le Cantal, c’est le plus petit département de la région. Alors certains autres territoires vont pouvoir réclamer près d’un demi-milliard !" s’étrangle Hervé Saulignac, le président PS du conseil départemental d’Ardèche.  

 

L’opposition socialiste s’étonne également du recrutement de la fille du président du conseil départemental du Rhône, Christophe Guilloteau. Pour Jean-François Debat, "c’est faites ce que je dis, pas ce que je fais" en référence aux critiques acerbes de M. Wauquiez de certains recrutements opérés sous la mandat de Jean-Jack Queyranne. "C’est pas Debat, c’est très bas !" rigole Christophe Guilloteau qui rappelle que sa fille sort de Sciences-Po et est élue dans le 2e arrondissement de Lyon.

 

La question de la compétence posée par l’opposition

Mais ce qui inquiète le plus, l’opposition, c’est que "Laurent Wauquiez ne se soit pas mis au niveau de la deuxième région de France" selon Jean-François Debat. Envoi de documents tardif, flou dans la présentation du budget, annulation de réunions de commissions à la dernière minute. "La question de la compétence de Laurent Wauquiez, on se la pose sérieusement" affirme Hervé Saulignac (PS).

 

"Lorsque M. Wauquiez décide de supprimer les structures qui géraient les contrats de développement durable Rhône-Alpes, ils suppriment dans le même temps 400 à 500 emplois" s’agace M. Debat qui ajoute : "donc oui, Laurent Wauquiez n’est pas au niveau, y compris lorsqu’il prend des mesures de dernière minute dont il ne mesure pas les effets".

 

Slim Mazni