Si on se souvient des marches républicaines contre le terrorisme qui avaient réuni dans tout le pays plus de 3,7 millions de personnes, dont 300 000 à Lyon, on se rappelle également que les banlieues avaient été tiraillées entre "Je suis Charlie" et "Pas Charlie" suite à la publication des caricatures de Mahomet en 2006. Un an après ce drame, Mohamed Tria, président du club de football de l’AS Duchère, a accepté de revenir sur ces évènements qui ont marqué d’une façon ou d’une autre les banlieues.
LyonMag: Les attentats de Charlie Hebdo sont-ils toujours des sujets abordés avec vos jeunes sur le terrain ?
Mohamed Tria : On en parle beaucoup par la force des choses ; les évènements de novembre ont malheureusement succédé à ceux de janvier.
Autant Charlie Hebdo avait positionné une relation un peu ambigüe avec les jeunes car nous étions sur des attentats un peu ciblés, autant les attentats de novembre ont clarifié le débat. Tout le monde a compris que ces actes là étaient à la fois commis par des gens remplis de haine et par des salauds. Cela a vraiment clarifié le débat sur ce que peut être Daesh et les actes abominables qu’ils sont capables de faire.
LM : Peut-on parler d’un "après Charlie" ?
MT : Je n’en ai pas le sentiment. J’ai l’impression que les évènements de novembre ont eu une résonnance beaucoup plus importante dans ces quartiers. Ils se sont rendus compte que cela pouvait atteindre n’importe qui. Cela a attaqué clairement nos modes de vie qui étaient les stades de football, les spectacles, boire un verre avec des amis.
LM : Les jeunes ont-ils toujours l’impression d’être stigmatisés ?
MT : Les attentats de novembre ont amené une stigmatisation qui était beaucoup plus forte que celle de janvier. Aujourd’hui les jeunes, je peux parler de ceux de la Duchère que je connais très bien, ont le sentiment que les projecteurs sont braqués sur eux. Quand ils se baladent, ils me racontent des éléments qui sont quand même difficiles à vivre au quotidien. Il faut absolument qu’il n’y ait pas de fractures entre ces deux bords de population parce que sinon les terroristes auront gagné.