A Lyon, les musulmans, priés de faire le ménage dans leurs mosquées, font 10 propositions

A Lyon, les musulmans, priés de faire le ménage dans leurs mosquées, font 10 propositions

Le préfet réunissait ce mardi les responsables du culte musulman et les maires du département après les fermetures des mosquées salafistes de Vénissieux et de  L’Arbresle. Les responsables musulmans ont promis de faire le ménage et font dix propositions. Le préfet leur a donné rendez-vous dans six mois.

Après les attentats de Paris, Michel Delpuech avait dit son intention de dissoudre les lieux de culte salafistes. Il est passé des paroles aux actes en fermant la mosquée Bilal à Vénissieux, puis celle de l’Arbresle (Rhône). La première pour des raisons de sécurité, la seconde en raison "d’un risque sérieux d'atteinte à la sécurité et à l'ordre public". Ce lieu de culte salafiste était fréquenté par des individus dont certains étaient en relation avec des djihadistes en Syrie.

 

D’autres mosquées étaient sous la menace d’une fermeture par la préfecture. Nous en dressions la liste le 23 novembre dernier. Mais le 28 novembre, soit deux jours après la fermeture de la mosquée de L’Arbresle, le préfet Delpuech réunissait en préfecture les responsables du Conseil Régional du Culte Musulman. Dans un communiqué commun à l’issue de cette réunion, le représentant de l’Etat et les responsables du culte sont tombés d’accord pour que les responsables religieux fassent, en clair, eux-mêmes le ménage dans leurs mosquées.

Extrait : "Le préfet a manifesté aux responsables musulmans du Rhône son inquiétude quant à la situation d’un certain nombre de salles de prière et de mosquées. Le préfet et les responsables musulmans ont passé en revue la situation de ces salles de prières et mosquées qui nécessitent une vigilance commune, chacun devant agir dans le cadre de ses responsabilités.

Les responsables du culte ont fait part de leur volonté et de leur engagement pour conforter les acteurs (présidents d’associations, imams) qui doivent l’être, restructurer les associations qui ont pu être débordées, les aider à s’entourer de personnalités responsables et de s’engager dans la voie de leur formation."

 

Des gages : travaux et fermeture épisodique

Du coup, des gages ont en effet donné aux autorités. Des mosquées menacées de fermeture en raison de non-conformité à la règlementation sur les Etablissements Recevant du Public (ERP)ont repoussé cette épée de Damoclès en prenant des décisions drastiques.

 

Dans le 8e arrondissement, la mosquée du passage Comtois a effet décidé de ne plus faire de prêche le vendredi, jour de la plus grande prière de la semaine. Devant l’afflux de fidèles ce jour-là, les prières débordaient souvent dans la rue.

 

A la Guillotière côté 3e arrondissement, rue Villeroy, les responsables de la mosquée se sont engagées à faire les travaux nécessaires. Toujours à la Guillotière, côté 7e arrondissement cette fois, la mosquée de la rue Sébastien Gryphe s’est engagée à limiter l’accueil des fidèles à 150 au lieu des 300 qui fréquentent habituellement la mosquée le vendredi.

 

Rendez-vous dans six mois

Pour Kamel Kabtane, le recteur de la grande mosquée de Lyon, constate en effet "qu’il y a aujourd’hui un zèle de la part de l’administration autour des lieux de culte qui posent problème. Mais la fermeture des mosquées n’est pas la solution. Il y a déjà un manque évident de mosquées et si nous fermons celles qui existent, les fidèles vont encombrer les autres mosquées. C’est ce qui s’est passé avec la fermeture de la mosquée Bilal ou la fermeture de la mosquée du 8e le vendredi. Nous avons dit au préfet et à nos responsables musulmans que c’était le moment de mettre aux normes les lieux de culte qui en avaient besoin". 

 

Le préfet a pris acte de cet engagement des responsables musulmans de faire eux-mêmes le ménage et a donné rendez-vous dans six mois. Cependant, il n’y a pas que les responsables musulmans qui ont fait un lobbying auprès du préfet pour éviter les fermetures de lieux de culte.


Interventionnisme d’élus

Des maires ont en effet assailli le cabinet du préfet pour trouver d’autres méthodes que la fermeture brutale de lieux de culte. Sur cet activisme quasi-clientéliste de la part d’élus, le préfet à la sécurité, Gérard Gavory commence par ironiser : "oh vous croyez…", fait-il mine d’interroger dans un sourire. "Globalement, les élus jouent le jeu mais, ici et là, il y a toujours des dérives que vous nommer clientéliste. Mais dans l’ensemble, les gens sont concernés", ajoute-t-il.

 

Le Conseil régional du culte musulman a fait dix propositions lors de la rencontre de ce mardi en préfecture. Sans les énumérer toutes, la création d’un conseil des imams du Rhône est sans doute la proposition la plus salutaire dans une religion qui pêche souvent par manque d’autorité en raison de l’absence de clergés.

 

Dix propositions

Le CRCM souhaite également que les mosquées s’ouvrent davantage à la société par l’organisation de portes ouvertes. Les fatwas (avis juridique) qui viennent de l’étranger devront être rejetées. Il conviendra également d’accompagner les imams afin de "construire des discours qui tiennent compte à la fois de l’authenticité des textes mais aussi de la réalité sociale économique et politique dans laquelle vivent les français de confession musulmane". La dixième proposition souhaite "donner toute leur place aux femmes dans l’organisation de culte musulman et la gestion des mosquées".

 

Le travail est considérable. Mais le préfet ne se contentera pas d’intentions. Il contrôlera les actions entreprises. Rendez-vous dans six mois.

 

Slim Mazni